mercredi 25 mars 2020

Autonomie : repères étymologiques et pédagogiques


Repères étymologiques


Autonomie (Pt Robert 2006) : du Gr autonomiaautonomos : droit de se gouverner par ses propres lois.
Autonome  (Littré en ligne) : Terme dérivé de deux mots grecs signifiant même (auto) et loi (nomos) ; qui jouit de ses propres lois ; Fig. Qui se fait sa règle à soi-même.

En pédagogie ce thème est mis en avant par ROUSSEAU pour qui il recouvre « l’obéissance à la loi que l’on s’est fixée soi-même », ou par ROGERS pour qui elle relève d’une « liberté pour apprendre ». 
L’autonomie met ainsi en jeu l’émergence de la conscience de soi et l’articulation opérée par l’individu entre sphère publique et privée ; en filigrane on perçoit donc le rôle que peut (doit) jouer l’école (et plus largement, l’éducation) dans la construction d’une certaine autonomie. Une idée issue des Lumières et représentée par l’idéal laïque : « on devient autonome par l’éducation » (MORANDI).
Des liens s’imposent avec les pédagogies actives (FREINET, OURY) privilégiant chez l’élève la construction et l’invention, les pédagogies non directives (puis néodirectivité de ROGERS), la pédagogie de projet (BOUTINET, 1992), ou le « travail autonome » des années 70 cherchant à dégager la mise en activité des élèves et leurs productions du modèle frontal M / E.

Pour MORANDI,  « le thème de l’autonomie constitue en quelque sorte le répondant de celui de l’autorité ». Pédagogiquement, « l’idée de l’autonomie de l’apprenant renvoie à la capacité d’apprendre de manière indépendante et de choisir les modalités d’apprentissage les mieux adaptées aux tâches à effectuer » (Morandi, La BORDERIE), que cela soit recherché en dehors de l’école (ce que l’on appelle autoformation) ou en son sein. Cette capacité à « prendre en charge son propre apprentissage » est une compétence à forte dimension sociale qui se trouve aujourd’hui mise en avant par le concept de « formation tout au long de la vie ». (DELORS, 1992 ; Lisbonne, 2000)

MEIRIEU avance pour l'enseignant quelques pistes :
« l'autonomie n'est pas un don ! […] Elle se construit dans la rencontre d'éducateurs capables d'articuler, […] une plus grande lucidité sur les valeurs qu'ils veulent promouvoir et un meilleur discernement du niveau de développement de l'enfant et des apprentissages qui peuvent lui permettre de progresser. » http://www.meirieu.com/DICTIONNAIRE/autonomie.htm

L’autonomie est un thème, une notion qui emprunte à l’évidence au socio-constructivisme dans l’idée que le développement ne précède pas les apprentissages (contrairement à ce qu’avance PIAGET) puisque l’autonomie « vaut le coup d’être tentée » quelle que soit le niveau de l’élève. Elle revêt le double aspect de but (ce n'est pas une aptitude naturelle, innée, mais c'est un objet d'apprentissage cohérent constitué par un ensemble d'acquis) et c'est un moyen d’apprentissage (lorsque les bases de l'autonomie sont acquises, elle devient un outil au service des apprentissages). Elle doit pouvoir s’entendre pour un individu dans le groupe, ou pour ce même individu travaillant seul. Dans tous les cas, la médiation de l’enseignant reste indispensable comme le rappelle ARCHAMBAULT (2006) :
« Dans les apprentissages, l'essentiel réside dans les aspects logiques ou formels, les contenus, les dimensions psychologiques et affectives des acquisitions et la socialisation des enfants. Il ne faut pas faire comme si les élèves étaient d'emblée autonomes. On leur apprend à le devenir. Or, l'acquisition de l'autonomie requiert nécessairement la médiation humaine : les enseignants en chair et en os. La pédagogie, relations humaines et sociales, demeure pour les enfants et les adolescents fondamentalement liés à la présence. »


Autonomie et compétence
Les rapports entre compétence et autonomie s'établissent dans les deux sens. Selon ZARIFIAN (2001), " l'autonomie est une condition incontournable d'un déploiement de la compétence ", parce que la compétence n'existe que si l'acteur a ou se donne une marge d'initiative et de décision, ne se borne pas à suivre des prescriptions.

Pour sortir de la seule sphère scolaire et élargir la question, « aucune organisation n'a intérêt à tout prescrire, elle compte sur le jugement des [parties] (salariés, citoyens, étudiants, voire élèves) pour prendre la bonne décision (TERSAC, 1992 ; Perrenoud, 2000). L'étendue de l'autonomie ouvertement reconnue, voire imposée par l'organisation du travail, dépend de la confiance faite au salarié. Cette confiance dépend de nombreux facteurs, parmi lesquels les compétences qu'on lui prête et leurs corollaires : sang-froid, lucidité, sûreté du jugement, conscience de ses propres limites, appui sur l'expertise collective.
Dans le travail, on peut donc dire qu'une compétence avérée est une condition nécessaire pour se voir reconnu une forte autonomie, en même temps que cette dernière est une condition du déploiement, mais aussi du développement de la compétence. »

C’est donc bien aussi dans cette dimension sociale et dans la perspective de l’inclusion future dans un monde professionnel élargi que s’entendent autonomie et initiative. Bon gré, mal gré, l’école se doit d’en tenir compte.

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